Quand on a cherché une maison, les agents immobiliers, alertés par
l’accent de Liam, lui demandaient
toujours d’où il venait. Quand il répondait, je suis né à Dublin côté nord, ma
mère vient de Cork et mon père du Kerry, ils avaient toujours eux aussi de la
famille dans ces coins-là. Souvent même ils connaissaient leurs voisins,
cousins, grans parents, oncles. Pendant
que moi je visitais les appartements, eux, ils restaient sur le pas de la porte
à discuter de leurs parentés. Quelles bêtes de relations publiques ces
Irlandais !
Les Irlandais d’Irlande se sentent Américains,
les Américains ont tous une origine irlandaise, une vraie histoire de famille. Les Irlandais ont tous de la famille aux Etats
Unis, surtout sur la Côte Est. Les vols
Air Lingus Dublin-New York et Dublin-Boston, fournissent un pont aérien entre
les deux pays. En sortant des gares de Boston et de Washington (je n’ai pas
vérifié encore Grand Central à New-york), que trouve-t-on ? Un magnifique
pub irlandais of course. Tout nouvel arrivé du peut illico se jetter une pinte
et retrouver le goût du vert pays.
C’est presque génétique. Depuis longtemps les Irlandais émigrent, ou rêvent
d’émigrer ou que leurs enfants émigrent en Amérique. Evidemment pour des
raisons économiques. Les parents Ethiopiens, Soudanais ou Philippins font les
mêmes rêves.
Vous imaginez le Président de la France
aller à Washington fêter le 14 juillet avec Obama ? Et bien c’est ce que
fait le Premier Ministre Irlandais. La fête nationale, la Saint Patrick le 17
mars, est plus fêtée aux Etats Unis qu’en Irlande. Parades, cup cakes verts, soda bread, chou, le
marketing se déchaîne en vert, toutes délicieuses spécialistes irlandaises, y
compris le Premier Ministre, on a tout eu à Washington. Il était plutôt sympa
et simple le Premier, la Guinness coulait à flot lors d’une énorme réception au Grand Hotel.
Dans son discours il a promis qu’il faisait tout pour que plus d’Irlandais
puissent émigrer aux Etats Unis. Comme François, notre nouveau Président,
l’avait fait l’année dernière, il a rencontré Obama. Mais pas comme François,
il lui a surtout demandé de régulariser
les sans-papiers irlandais. La loi sur
l’immigration en discussion au Congrès américain suscite beaucoup d’espoirs
pour ceux-là. Moi je trouverais bizarre que notre Président vienne plaider le
14 juillet auprès d’Obama pour que plus de français puissent quitter la France.
Les copains irlandais, eux, ils trouvent cela normal. Normal qu’il y ait infiniment
plus d’Irlandais en dehors que sur le sol national. La nouvelle génération
incarnée par la fille de mon mari en particulier, elle, accepte mal de devoir
émigrer faute de travail chez elle. Les enfants sont donc en colère contre la
classe politique irlandaise qui a ruiné le pays, les obligeant à émigrer.
Tandis que les Américains d’origine
irlandaise sont restés conservateurs, les Irlandais arrivés récemment n’auraient
pas l’idée d’aller à la messe, et ne sont pas opposés à l’avortement.
Vous avez compris, ce ne sont pas les
plus progressistes qui restent en Irlande. Dommage.
Les Irlandais d’Amérique restent en tout
cas très attachés à leur pays et à leur famille de là-bas. Mais ils souffrent
du fossé culturel qui se creuse avec leurs mères. Elles se réjouissent mais
leur en veulent en même temps. J’imagine que mon père, monté à Paris dans les
années quarante, a dû vivre la même expérience avec sa famille restée au
village. « Pour qui se prend-il celui-là ? ». Moi je jure que
n’ai pas changé, je suis restée la même !
Donc les Irlandais de Washington suivent
de très près les performance de l’équipe de foot nationale. Ils regardent les
matchs dans les pubs quand le décallage horaire le permet, mais on se lèvera à
5 heures du mat pour un match qui vaut le coup.
La diaspora irlandaise se fréquente
beaucoup à DC. Les lads (potes) se retrouvent régulièrement dans la cuisine des
uns et des autres, pour jouer de la musique et chanter, avec un enthousiasme
imputrescible, les classiques du répertoire irlandais. Mon répertoire à moi va de l’« Oranger sur le
sol irlandais, on ne le verra jamais » (Bourvil, difficile à chanter) au non
moins imputrescible « la Vie en Rose », dont on ne se lassera jamais,
repris en en chœur par les voix irlandaises. Un tabac. Nous les français(es) on
peut emballer autant d’Irlandais qu’on veut avec des trucs simples comme ça.
Si vous allez en Irlande, révisez le
répertoire Edith Piaf.
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