Friday, December 20, 2013

Quand le jazz est là...

L'année se termine, ma deuxième année à Washington. Je pense à Alain Mabanckou. Je trouve formidable qu'une université américaine lui ait demandé d'enseigner la littérature francophone, à lui un Français d'origine congolaise. Il déclare que toutes les villes sont belles et qu'avec chacune il a une relation particulière: Brazzaville où il est né, Paris, la ville de ses rêves, Bruxelles ensuite et Los Angeles où il vit maintenant. Je constate qu'Alain et moi on a trois villes sur quatre en commun. Il cite aussi Dany Laferrière qui considère que l'écrivain devrait vivre dans une ville qu'il n'aime pas. Parce que cela aide à créer de ne pas se sentir bien où on vit? " Pour moi une ville c'est le mélange entre la physique de la ville et la chimie des gens qui y vivent. Si le cocktail fonctionne, on y plonge.

L'identité française est-elle fongible dans le  Grand Bain Américain? Impossible my dear, car on me rappelle sans cesse d'où je viens. Je ne m'étais jamais posé la question de ma francitude avant de venir ici où on ne se contente pas de la simple réponse "I am Frrrench". Verre en main, l'interlocuteur reattaque sans respirer: "where in France?".  Je réponds tranquillement Paris, c'est plus simple, de toute façon l'effet est garanti, les yeux de l'autre se mettent in petto à briller, comme si j'avais appuyé sur un interrupteur.  Pour moi c'est trop compliqué d'expliquer que je suis née en Afrique, que j'ai vécu en Normandie, à Nice, à Bruxelles, Paris-9ème-et-Barbès le quartier des Sapeurs, les amateurs de Sapes élégantes dont parle si bien Mabanckou.

Si quelqu'un me demande si j'aime Washington je réponds que je n'ai jamais eu autant l'impression de vivre au milieu de stéréotypes, blancs riches et minces, noirs pauvres et gros, qui ne se mélangent pas. Sauf au club de Jazz et chez BuzzBoys and Poets, une chaîne de restau-bar-librairie-concerts-galerie à la déco colorée, tables basses, sofas profonds, un lieu qu'adoreraient nos bobos.
Ce qui est bien à Washington, c'est que, en plus des Américains dont j'ai parlé dans ce blog, il y a aussi plein d'autres pas Américains et on baigne tous ensemble dans notre diversité dans la culture américaine. On vient de partout mais on se ressemble (évidemment pas moi, d'abord je n'ai pas les cheveux longs) et on fait tous les même choses: positiver (enfin faire semblant de) et être polis, s'excuser pour tout, faire des happy hours et du networking, déjeuner d'une soupe pho, d'un poulet tandoori ou d'un falafel achetés à  un Food truck,


c'est beau l'Automne mais fatiguant à ramasser
ces camionettes aux couleurs flashy qui stationnent près des bureaux, prendre un coach de vie, rencontrer des amis pour le brunch le week end et boire du mimosa, Prosecco et jus d'orange (détonnant pour un estomac fatigué par un samedi soir chargé) ou Bloody Mary à réveiller une momie, écouter Rachel Maddow qui passe toutes ses soirées sur la chaîne MSNBC à se moquer des Républicains, se faire peindre les ongles, balayer des tonnes de feuilles devant sa porte au Fall,  courir sous la neige avec un bonnet de père Noël, et surtout raconter sa vie personnelle à des inconnus qui te trouvent amazing. Je passe beaucoup de temps à écouter les parcours des réfugiés politiques que je rencontre au volant des taxis, en train de ranger les fruits et légumes dans les rayons du supermarché, dans le vestiaire du club de gym du DCJCC.  Surtout des Africains venus du Soudan, Cameroun, Congo, Togo, Ethiopiens qui sont 200 000 parait-il ici. Des jumelles éthiopiennes sont les propriétaires d'un super club de jazz, le "Twins" où j'enmène tous mes visiteurs. Les deux dames sont photographiées très jeunes dans les années 70 à l'entrée du club. Tous les soirs de l'annnée elles sont juchées sur des tabourets du bar et regardent des matchs de base ball muets pendant les concerts. Elles font partie de la mythologie de U Street, le quartier des émeutes raciales et des manifestations pour les droits civiques. Aujourd'hui c'est Le lieu où sortir, les bars et restaus y poussent à chaque seconde et la foule s'y presse les week end, filles brushées en micro jupes oscillant sur talons vertigineux et gars en jeans tombant sur les hanches et chemises à carreaux de bûcheron.

En fait le Jazz ici, c'est pas rien





Thanksgiving à Montpelier, Virginie, et le noeud de Christine

Je vois son dos, il porte une veste de toile goudronnée kaki, il est assis sur un tabouret et il est penché sur les entrailles d'un gros tracteur rouge auquel est amarré une remorque.
Nous lui lançons un hi, hello, helloooo, sans obtenir de réaction. Mais quand on s'approche il tourne  enfin vers nous sa tête chapeautée de la même toile goudronnée. Son visage est aussi  rouge que le tracteur et ses  lunettes lui occupent la moitié du visage. Il nous accorde un regard bref et inexpressif et revient à son moteur dont il éclaire les profondeurs à l'aide d'un i.phone. C'est notre hôte dont la femme, une américaine avec qui je travaille, nous a invités à célébrer Thanksgiving. Tu verras, m'a-t-elle promis, un vrai Thanksgiving traditionnel, mon mari et moi on fait  chaque année une compétition de dinde, lui c'est façon coq au vin, moi je la fais rôtir.


La maison est à environ une heure et demie de Washington, sur la route du Parc National de Shenandoah. Le paysage, les maisons, les collines ont un air familier parce qu'ils me rappellent les peintures d'Edouard Hopper. Tout autour ce ne sont que des champs roussis par le gel, une forêt, sans doute habitée par des ours, quelques maisons  isolées, du matériel agricole, des camionettes et des hangars, le tout éclairé par un soleil bas d'hiver.
En contre bas de la maison s'aligne une rangée d'étables en bois décorées par un bric à brac sympathique dominé par les équipements des chevaux. Justement ils sont là, ils nous regardent très posément, trois têtes au-dessus de la barrière s'avancent vers nos caresses.
Le jeune est arrivé à fond de train dès qu'il nous a aperçus de l'autre côté de la prairie. Les autres ont pris leur temps mais ils ont suivi. La jument plus âgée nous observe de loin, digne et tranquille sous sa couverture qui lui fait comme une grande cape bleue très chic. Restés dans les écuries, les chevaux de course se tordent le cou pour nous saluer.
La maison jaune aux volets bleus domine la campagne, tout l'intérieur rappelle les chevaux, pas un tableau, pas une photo, pas un objet décoratif qui ne représente un cheval.
Mais ce jour là est dédié à la dinde et tout ce qui va avec, patates douces, purée de pommes de terre, haricots verts, compote de fruits rouges, crême aigre, tourtes au potiron et aux noix de Pécan. Tout est délicieux.
J'ai failli apporter une tarte Tatin mais elle n'a jamais voulu décoller du moule, un échec cuisant. J'ai du me rabattre sur le cheesecake au potiron du pâtissier Firehook au coin de Dupont. Je n'ai pas pu la jouer  la Française qui sait cuisiner. N'ai je donc tant vécu que pour cette infamie?

A la fin du repas, le maître de maison qui trône au bout de la table d'où il peut aisément atteindre le placard aux alcools, en extrait toutes sortes de bocaux qu'il nous propose généreusement.  Il devient loquace pour nous expliquer que la gnôle est faite maison. Oui, la nuit venue, en Virginie, tout le monde  fabrique son tord-boyau à base de fruits fermentés,  le Moonshine parce que fabriqué au clair de lune. C'est joli comme nom dis-je, moi qui ne l'ai pas encore goûté. Joli de nom mais qui te tue. Tu trempes tes lèvres avec précaution dans le verre et, immédiatement, tu te demandes avec inquiétude si tu vas survivre. La boule de feu dévale ta gorge, brûlant au passage tes poumons et te coupant la respiration, puis elle explose dans ton estomac qui se demande ce qui lui arrive, le pauvre, tandis que, les yeux larmoyants tu reposes ton verre à tâtons sur la table. Pas que des fruits fermentés dans le Moonshine.

Après diner nous avons chanté, des chansons typiques de chez nous, les uns et les autres, l'hôtesse chantait bien et s'accompagnait à la guitare, son neveu chéri acteur de cinéma était venu exprès de Los Angeles et nous a interprété une scène de la série Gray's Anatomy où il tient un rôle de jeune malade atteint de multiples tumeurs. Il est très excité par ce premier rôle de cancéreux, dont le traitement soulève les questions des médecins réunis à son chevet.  L'épisode cependant se termine sur une note optimiste car la docteur déclare à son confrère dans le couloir de l'hôpital qu'elle pense pouvoir le sauver. Ce qui veut dire pour lui tourner un autre épisode, un plus grand rôle, le commencement de la célébrité, qui sait?  Ensuite les autres invités ont lu des poèmes que malheureusement je n'ai pas compris et une petite fille a chanté, concentrée et les yeux fixés sur le plafond, d'une mignonne petite voix.

Depuis, les fêtes n'ont pas cessé. Vais-je finir comme Abraracourcix le chef du village gaulois après son Tour Gastronomique,  portée sur un brancard jusqu'à Lutèce ? Comment durer jusqu'à Noël alors que chaque jour, chaque organisation, institution, groupe d'ami y va de son drink, de son diner?
A la maison on s'y est mis aussi et on a même réussi à faire danser des Américains et des autres du melting pot sur Alexandra, Alexandrie, les Rita Mitsouko et le délicieux Stromae.

Le plus grandiose happening de Noël c'est quand même la fête du Fonds Monétaire, oh my god, c'était encore mieux que le bal d'inauguration d'Obama. Tout le gigantesque bâtiment éclairé en boîte de nuit, avec des kaleidoscopes de lumières colorées donnant une ambiance feutrée, les salles de réunions transformées en salles de danse avec parquets, des bars croulants sous les alcools, mais pas de champagne quel scandale, des buffets débordants de nourritures riches, des kilomètres de sushis, une fontaine de chocolat où tremper sa fraise au bout d'un pique, des montagnes de choux à la crème chantilly et de petits fours dégoulinants, un karaoké, l'orchestre rock des sexagénaires du FMI très en forme, et enfin, un super groupe de punk, pop, disco conduit par deux ravissantes jeunes black qui chantaient et bougeaient comme des déesses et ont déchainé ces messieurs en costards et ces dames vétues de leurs plus beaux atours. Pourtant certains me rapportent que ces fêtes ont beaucoup baissé, avant on avait caviar et Cirque du Soleil…oui mais nous on a eu Christine.

Car le clou, je veux dire le noeud de la soirée c'était quand même sa nouvelle coiffure. On ne parle que de ça à Washington en cette fin d'année

Joyeux Noël à tous

les princesses du FMI









Monday, November 4, 2013

Le marathon de New York 2013 j'y étais, moi Kevin K, of course !


Ça a mal démarré car je n'ai pas entendu mon réveil, j'ai sauté dans un taxi à 6 heures10 pour attraper  à la 51ème rue le bus qui conduisait sous bonne escorte policière tous les participants jusqu'à Verrazano Bridge.
A 8 heures on nous a fait passer les contrôles de sécurité qui étaient très stricts cette année. On a laissé nos affaires, elles ont été mises dans des ballots qui seraient transportés au point d'arrivée. 
Ensuite on a attendu une heure dans un vent glacé avant que le signal de départ ne soit donné pour notre vague,  qui était la première fournée de 17 000 coureurs. Trois autres identiques nous ont suivis à 25 minutes d'intervalles. Je courais avec mon équipe Team For Kids (note de la traductrice : les membres de groupes soutenant des projets sociaux étaient inscrits d'office au marathon). Cela faisait du bien d'être ensemble.

Après la traversée du pont qui fait 2 miles on est arrivés sur Bay Ridge et Brooklyn où enfin on a été tout de suite abrités du vent mordant. Puis le soleil est apparu. On a commencé à enlever nos couches de vêtements alors qu'on serpentait dans les rues de Brooklyn en direction de BAM. La foule nous encourageait de façon incroyable et il y avait des groupes de musique vraiment cools tout au long du parcours. 

Ensuite on nous a annoncé que nous étions au mile 13 alors qu'on traversait le Pulaski Bridge, le second des 5  ponts de la course. Après avoir descendu la 59ème on a commencé à monter sur le Queensboro Bridge.  Je courais depuis deux heures et calculai que je pouvais finir la course en 3 heures et 40 minutes à ce train là. 
Comme nous passions le marqueur des 15 miles, on a su que le gagnant catégorie masculine passait la ligne d'arrivée à Central Park en 2 heures et 8 minutes. 
Il était soudain plus riche de 100 000 dollars, mais surtout il avait fini le veinard !
Mon groupe de coureurs à salué l'annonce par des grognements appréciateurs. Pas le temps de s'épancher !

Un des points forts du Marathon de NYC est la descente du pont vers la 5ème Avenue, qui est considérée comme un des points les plus animés et bruyants du parcours.  Je n'ai pas été déçu, cela a été vraiment exceptionnel cette année. Bien mieux que n'importe lequel des concerts de rock auquel j'ai jamais assisté. Du coup cela a bien boosté  notre adrénaline.  Mais malheureusement une douleur atroce a surgi à ce moment là dans ma hanche gauche, je ne sais pas ce qui lui a pris à ma hanche.  Mais j'ai continué à courir malgré la souffrance, et puis j'ai vu assez vite Barrie et Shane (ndt: épouse et fils) qui m'attendaient au coin de la 63ème, je les ai vite embrassés avant de continuer. 
Les kilomètres suivants ont été abominables, ma hanche me lâchait et j'ai cru abandonner. 
Au mile 18 j'ai adopté une marche rapide en espérant que le changement de rythme soulagerait la douleur. Cela a en effet un peu amélioré les choses et j'ai poussé à nouveau l'allure en abordant le Bronx et Harlem en traversant le Wills Avenue Bridge et un mile plus loin, le pont de la 3ème Avenue pour revenir sur Manhattan. 
La foule dans le Bronx était encore plus fantastique, on nous tendait  des tas de trucs, des bananes, des kleenexs, et des milliers d'affichettes étaient brandies au long du parcours où étaient écrits toutes sortes de messages qui nous faisaient marrer comme "les tétons blessés (note: par le frottement du maillot pendant la course) nous excitent".  

On est vite arrivés au niveau de la 5ème Avenue et de la 122 ème Rue, Central Park était soudain terriblement proche. On avait le soleil en face, encore plus avec le changement d'heure de la nuit d'avant, mais un petit vent nous poussait gentiment dans le dos. Il ne s'agissait plus que de se laisser descendre de la 110ème à Engineers Gate, mais après il y avait la cruelle, s'il y en a une c'est bien celle là, remontée de la 90ème. 
J'étais à un cheveu de Central Park, enfin dans mon territoire familier de coureur, dépassant le mile 24, puis le 25, je prenais de l'allure, déterminé à y aller fort au finish.  Alors que je sortais du Park à la 59ème je dépassais un coureur qui venait de s'écrouler, entouré de soigneurs, si proche du but. 
Et puis une descente douce vers Columbus Circle, un demi mile encore et l'adrénaline qui recommence à monter, la foule déchainée qui nous acclame. La rumeur s'amplifiait alors que nous entamions les derniers 400 mètres, grimpant la colline avec joie, douleur, crampes et muscles rigidifiés.
Ma montre indiquait 3:48:29, une demi minute de mieux qu'en 2011.
J'étais heureux et ravi d'être encore en vie. Quelque soit le nombre de fois que j'ai couru une telle distance, c'est surprenant à quel point c'est à chaque fois une  leçon d'humilité.

Je ne sais pas si c'est le résultat de la frustration causée par l'annulation l'année dernière du Marathon pour cause de l'ouragan Sandy et de l'aide de 12 000 volontaires, en tout cas j'ai réussi à surmonter les obstacles de mon mental.  
 Je suis donc super content d'être allé jusqu'au bout avec les autres presque 48 000 finalistes !

Note de la traductrice: on ne peut pas dire que le Marathon de New York c'est la solitude du coureur de fond. 

Le texte original de Kevin :
Well my marathon experience this morning began inauspiciously - oversleeping my 5am alarm by one hour . Despite having reset all the clocks last night our bedroom one must have some software that pushed it back another hour. Needless to say it was panic stations as I dashed out from the apartment at 6:10am to make our bus departure 6:30 from 51st and 6th. Luckily my cab driver was speedy and direct and i literally made it with about 5 minutes to spare. In my haste I had forgotten my water bottle and some other supplies. Then all the buses departed em masse from midtown with a police escort to the Verrazano Bridge.
Once we got there at 8am we literally had a few minutes in our tent once we had cleared security, which understandably was much tighter this year. Then it was bag drop at the UPS trucks which would be ferried to the finish and then into our corral. Probably one of the most difficult aspects of that was that the air temperature was cold and very windy - plus we waited an hour before the race began for us leaving in wave 1. There were seventeen thousand runners in my wave alone, three other waves followed us at 25 minute intervals. I was running with a bunch of my TFK team mates and the camaraderie was most welcome.

Once over the 2 mile bridge we dropped into Bay Ridge, Brooklyn which instantly provided more shelter from the biting wind and the sun came out. Layers were discarded and plenty of fluid stops were encountered as we snaked our way through the streets of Brooklyn, heading towards BAM. The crowds were unbelievably supportive and there were some really cool bands to be heard at mile intervals. Next thing we knew we were at mile 13 and on the Pulaski Bridge - the second of five in the race. Then we quickly dropped towards the 59th Street Queensboro bridge and began the one mile climb to its plateau . It was roughly two hours into the run and i was on pace for a sub 3:40 finish. As we passed the 15 mile marker the male winner crossed the line in Central Park in 2:08 . He was suddenly $100K wealthier plus more importantly he was finished. A collective groan emanated from runners around me.

One of the highlights of the NYC marathon is the descent off of the bridge onto First Avenue. Regularly considered to be one of the loudest points in the race, this year was exceptional . It was louder than any rock concert I have attended and the adrenalin was surging. Also surging was a intense pain in my left hip joint - I could not tell whether it was muscular or structural , either way it was a blow. I pushed on in pain and quickly saw Barrie and Shane at East 63rd street. A quick hug and an exchange of supplies and I was off. Honestly the next few miles were a struggle, my hip was raging and I seriously thought that I may be done for the day. At mile 18 i slowed to a fast walk to allow my form to change with the hope that it might induce a reduction of the pain. It altered it but was still present. I pushed on up the the Bronx and Harlem crossing over the Wills Ave Bridge and a mile later the 3rd Avenue bridge and back into Manhattan. The crowds in the Bronx were special, handing out bananas and tissues and holding up a myriad of funny signs - "Chafed nipples turn us on " was a highlight. Its amazing how a funny sign can carry you for a big chunk of miles.

Then we quickly headed south onto Fifth Avenue and 122nd street, Central Park agonizingly close. The sun was full bore in our faces at this point, even more so because of the time change overnight but we were bolstered by a slight tail wind. There was the slight matter of navigating the slow incline from 110 street to Engineers Gate at 90th street - a cruel rise if ever there was one. Within a whisker I was in Central Park on my more normal running terrain, mile 24 passed, then 25 passed. I picked up speed and was determined to finish strong. As I exited the park at 59th street and Central Park South I saw a fellow runner laying prone on the ground surrounded my medics - so close and yet not. Another slow incline from the Plaza to Columbus Circle , a half mile to go and the adrenalin is cruising now, the crowds fanatically baying us on. The noise crescendoed as we dashed the last 400 meters, up hill again to cross with joy, pain, cramps and general stiffness. But my watch said 3:48:29 - a half minute better that my 2011 time. I was thrilled and happy to be still alive. No matter how many times I have run this distance it is amazing what a humbling experience it truly is.

Whether is was the accumulated frustration of last years cancellation due to Hurricane Sandy , the event passed off seamlessly which is a great testament to the 12,000 volunteers who help out . While i did not win any prize money I overcame the mental obstacles that could have so easily afforded me an out - as did the almost 48,000 other finishers !

LE HEROS KEVIN ET LIAM QUI L'ENCOURAGE "GO NODDY  GO"









LOCO= FOU








c'est fini ! 
JE RENTRE EN TAXI

Thursday, October 17, 2013

La rentrée
















Le barbu s’esclaffe sur le banc, si fort qu’on l’entend de l’autre côté de Dupont Circle. Il est gros et il est noir. Sont disposés à côté de lui des portraits  peints maladroitement à l’aquarelle d’hommes et de femmes, blancs. 
Plus loin un autre  noir en survêt gris informe, planté au milieu du trottoir, braille inlassablement, sur un mode-genre-gospel qui nous martyrise les oreilles : "Yes I changed","O my LOOOOORRRRDDD".
Devant la pharmacie- tabac CVS de Dupont, un monsieur tient un écriteau sur lequel est collé un paquet de cigarettes, "ICI à CVS, on vend du poison".

 Il est 8 heures du matin, on est en septembre, le soleil chauffe déjà. La procession des morts-vivants a démarré sa descente vers les institutions financières internationales pour s’occuper de la pauvreté dans le monde. C’est vendredi, c’est casual day, tous en jean pour aller au bureau.
A la terrasse de l’hôtel Dupont les hommes d’affaires sont aux œufs frits-bacon-jus d’orange et leurs épouses consultent déjà le programme de leur week-end touristique à Washington.
 En attendant le bus je regarde dans la vitrine de Dunkin and Donuts le défilé des beignets sur un tapis roulant. Les anneaux frits reçoivent au passage une douche de sirop blanc qui les rend translucides puis une giboulée de granulés jaune, vert, rose,  ou bien un glaçage de chocolat noir. Ensuite un jeune homme noir en blanc les décore d'unn filet « spider web » de sucre rose et les range dans des boîtes en carton.

L'autre jour, je patientais à l'autre arrêt de bus, celui qui se trouve à la sortie du métro Dupont. La bouche  du métro est comme un entonnoir en béton qui mène aux entrailles de la terre, un gouffre vers lequel s'enfoncent des escaliers immenses et, justement, ils sont en panne. Depuis des mois, j'observe le matin les trois ouvriers en salopette bleue qui réparent à la vitesse d'une couleuvre le Grand Escalator de Dupont. Vous avez compris, le matin j'ai le choix, soit ce sont les beignets, soit ce sont eux. Alors là, un gros policier noir me demande pourquoi je les regarde comme ça. Je lui explique que j'aime les travaux pharaoniques sans fin qui me rappellent la Belgique, les travaux à la gare Schumann par exemple, aux pieds de mon bureau. J'ai  aussi l'impression d'être devant la Grande Pyramide inversée. Il ne comprend pas mon exposé mais constate, allez-savoir
comment, que je suis Française et m'interroge sans ambages sur Paris où il conduira son épouse bientôt. Là je sors ma carte du métro parisien qui ne me quitte pas, sait-on jamais, et le doigt sur les stations je lui explique Le Louvre, L'Opéra, Saint Germain des Prés, mais le bus arrive et je le quitte en lui disant à demain.


Quand je monte dans le bus, je salue le gros chauffeur noir qui me reconnaît, il nous bénit, les passagers, à chaque descente, d’un «God bless you, have a nice day ». Les passagers  lèvent  furtivement le nez  de leur téléphone, je reconnais certains à leurs livres, deux jeunes filles aux longs cheveux blonds lisent « Beyond the war » et  «Let the great war spin », une autre est intensément absorbée dans «Success and happiness ». Au prochain arrêt monte un homme chauve en short et baskets  qui se met  à déclamer la Bible, je repère qu'il est question d'un certain Jacob, de toute façon ça casse l'ambiance. On se replient tous de plus belle dans nos smartphone. 
Souvent un jeune se lève et me propose son siège ce qui me blesse atrocement, alors je prends un air dégagé et refuse systématiquement l'offre, même si j'ai envie de m'asseoir, quel affront.

Sur la route de mon bureau on passe devant la Maison Blanche, c'est un happening permanent ici. L’autre matin un serviteur noir vêtu de blanc promenait  sur la pelouse verte le chien noir des Obama, ce qui mettait les rares touristes présents au bord de la crise de nerfs tandis que, devant les grilles, des silhouettes encagoulées en combinaison orange dénonçaient Guantanamo. Tout près d'eux, un monsieur  se tenait raide comme la justice et lisait la Bible en pourfendant Obama à qui il prédisait des trucs désagréables s'il continuait comme ça. Etait-il envoyé par le Tea Party? Il n'avait en tout cas pas le profil, il était noir. Plus loin des militants s’étaient rassemblés sous les arbres, brandissant des défenses d’éléphants en caoutchouc.
Les copains du Tea Party manifestent pour le retour à la première Constitution américaine



Ce matin, une dame très âgée s’achemine  péniblement vers ces grilles, pancarte sous le bras. Assise à l'arrière du bus je me tords le cou pour essayer de lire ce qui est écrit sur sa pancarte. J'aimerais bien lire le message qu’elle y a écrit, quelle cause a-t-elle tellement à coeur de défendre si tôt le matin toute seule? 
elle a tricoté ses protestations sur le budget de la Défense sur un parapluie

Sur les marches du Trésor américain,  un SDF dort encore, enveloppé dans une couverture en peluche violette. Un autre, handicapé en chaise roulante, a trouvé un domicile fixe dans un porche, on est à deux blocs de la Maison Blanche.

A l’arrêt du bus, des hommes et des femmes, des ouvriers du bâtiment apparemment, tournent en rond  sur le trottoir en scandant  des slogans sous les encouragements d’un  porte voix. Tous les jours cette semaine il crient leur colère à leur employeur.



Je descends du bus et pénètre dans "Prêt à manger" pour m'acheter un trop grand et trop chaud café dans un gobelet en carton. Et puis j'hésite devant le pain en chocolat qui affiche clairement la couleur, 400 calories, information qui me plonge dans un abîme d'interrogations existentielles. Je réalise qu'il me faudrait courir au moins deux heures sur un tapis roulant pour liquider ce délice-là. La vie est injuste.

L’empreinte de mon index libre, l'autre enserre le gobelet de café, est scannée. Une lumière verte déclenche l'ouverture d'un portillon, comme dans le métro. Je peux pénètrer dans l’immeuble où je travaille. Je salue le gardien, une femme en tenue de cycliste encore casquée monte avec moi dans l’ascenseur, on se dit buenos dias puis on regarde ailleurs. Je suis arrivée dans  mon bureau d'où j’aperçois par la fenêtre les cuisinières latino américaines. Elles ont déjà commencé à préparer  le déjeuner de la cantine. Une d'entre elles est en train de couper des tomates en rondelles.

J’enlève mes tongs et enfile des escarpins. J'allume l’ordinateur. Je presse control, alt, delete. L'écran s'allume. 


J’irais bien couper des tomates.





Sunday, September 15, 2013

L’hôpital du monde




Je suis couchée dans un lit protégé des autres par de grands rideaux blancs, près du bloc opératoire. J’ai revêtu la blouse à petites fleurs rituelle, celle qui s’attache dans le dos, et je suis prête. C’est le moment spécial, avant, quand on sait qu’il va bientôt y avoir un vide, et on a un peu d’appréhension. Mais  pour l’instant je me sens le centre du monde car sont groupés autour de moi une foule de  nouveaux visages souriants. Les uns après les autres,  pourtant il n’est que six heures du matin,  très en forme ils se présentent « hi, I am Donna, I am the assistant of docteur Knock », « Hi I am Rosa, I am your nurse » etc. La planète entière défile à mon chevet, Panama, Inde, deux jeune « stagiaires » coréennes « si excitées de voir opérer le grand chef », un athlétique anesthésiste iranien, tous les continents m’entourent en blouse verte et charlotte sur la tête.  On se croirait à un événement social très attendu dont je serais la guest star.  Chacun me demande de lui répéter mon nom, ma date de naissance, me fait signer des papiers. Oui je sais pourquoi je suis là, je suis consciente que je ne suis pas à la plage,  je confirme que  je suis d’accord avec ce que vous allez me faire et que je sais qui je suis, oui je veux bien être anesthésiée (il ne manquerait plus que ça). Pas question de plaisanter et de répondre que je m’appelle Gérard Depardieu par exemple, on ne rigole pas avec le règlement qui exige un consentement « éclairé » avant de sombrer.
Mon Chirurgien, le seul Américain blanc de la pièce, et  aussi le plus corpulent de la bande, vient me présenter ses hommages, en Français ma chère. Pour l’occasion il est sanglé dans un élégant costume gris clair, chemise blanche et cravate bleue. Il est fort bien mis à cette heure, est-ce bien approprié aux circonstances ? Je m’étonne, mais il m’annonce très vite qu’il doit à présent se changer et me quitte en me disant à tout à l’heure.  Puis tous disparaissent  et je regrette ces rencontres si fugaces, les reverrai-je tous ? Est-ce que je vais les reconnaître, me souvenir de leurs noms?
Je suis restée seule avec Iman, l’anesthésiste aux charmes de l’Orient. On se présente l’un à l’autre, on parle, il me demande d’où je suis, je lui demande d’où il vient,  conformément au code social de Washington. Il déclare qu’il se sent Européen car il a passé son enfance en Allemagne et il connaît bien mon si beau pays. Je lui raconte que je viens de rentrer de Marseille qui est cette année la capitale européenne de la culture. Je soupire que la Méditerranée me manque ici.
C’est le dernier mot que j’ai prononcé. Et notre relation en est restée là, même si j’imagine qu’il était là pour me réveiller puisque c’est son boulot.
Bien plus tard je suis dans une chambre d’hôpital. Je dors, enfin j’essaie. Dans le brouillard dans lequel je flotte, en fait c’est assez délicieux (morphine ?) surgissent à  courts intervalles des représentants de la galaxie du George Washington University Hospital. Un défilé continu interrompu par mes retours dans le coton. Ce ne sont pas les mêmes qu’avant l’opération,  et ces êtres humains-là ne surgissent pas en même temps dans mon champ de vision. A chaque fois la porte s’ouvre d’un coup, ils traversent la chambre et me saluent quand ils arrivent au pied de mon lit. Chacun est costumé et outillé différemment selon la corporation à laquelle il appartient. D’abord je fais connaissance avec l’infirmière de l’étage équipée d’un thermomètre qu’elle me plante dans la bouche. Puis le plombier en tenue orange, mallette en main, m’interpelle parce qu’il vient « fixer quelque chose dans la salle de bain ». Je me rendors à peine pour voir apparaitre la femme de ménage et son balai, qui  me demande si  la chambre a besoin d’être nettoyée. Puis c’est au tour d’un serveur de la cuisine venu prendre ma commande pour le déjeuner et qui me colle un menu dans la main. Il est suivi de re-l’infirmière, zappeur en main, qui a « oublié de m’expliquer comment marche la télé ». Elle même précède un monsieur en costume qui mène une enquête de satisfaction : « comment noteriez-vous les performances suivantes de l’hôpital ? ».  Je l’arrête avant qu’il  ait terminé l’énumération des prestations du GWUH.
Pour finir une blonde doctoresse m’annonce, sourire américain aux dents   étincelantes, qu’elle a signé les papiers et que je peux sortir quand je veux,« quand vous vous sentirez reposée ».   
Ici c’est comme au restaurant quand on apporte l’addition avant que tu ne l’aies demandée en déclarant « take your time ».

J’ai filé à toutes vitesse et je suis allée me désanesthésier  sur mon canapé peuplé de mes seuls rêves, où j’ai dormi jusqu’au lendemain. 

Sunday, July 21, 2013

American Târtouf




J’ai assisté à une représentation de Tartuffe de Molière. Les acteurs prononçaient «Târtouf ».  La pièce se déroulait dans le joli jardin d’une maison géorgienne de Georgetown, le quartier traditionnel huppé de D.C. Le casting de la troupe amateur faisait rêver.  Orgon travaillait  au Département de la Défense, Valère était conseiller à la Maison Blanche, Elmire journaliste chez Bloomberg, Orgon, avocat d’affaires, Dorine professeur d’Université, Tartuffe à la tête de trois restaurants aux noms bien français « Napoléon, Bonaparte, Malmaison ». A quand l'ouverture du glacier Berezina-Sainte-Hélène ?
Le thème de Tartuffe m’a paru très en phase avec le milieu ambiant. Dans sa pièce Molière dénonce l’hypocrisie, les faux-bons sentiments et la bondieuserie. Le comportement de Tartuffe masque basses manœuvres et  turpitudes pour s’approprier les biens d’Orgon et séduire sa femme.  Les politiciens américains font de la târtoufferie sans le savoir quand ils en appellent à la  morale, aux valeurs et à la religion à la rescousse pour justifier certaines politiques. Ils interdisent l’alcool aux moins de 21 ans mais  dés les derniers examens passés, les jeunes sont lâchés  dans des summer breaks très arrosés. La pratique du Happy Hour dés 16h  dans les bars encourage à démarrer tôt la picolade, surtout des jeunes. Boire après le travail entre collègues cols blancs est bien vu ici, cela fait partie du statut et du networking.
Tous les présidents américains disent qu’ils croient en Dieu, et même Obama « lui parle tous les jours ». Est-ce que c’est Dieu qui lui a dit de mettre la planète sur écoute ? Les Républicains sont passés maîtres de la Tartufferie, qu’il s’agisse de nier la réalité du changement climatique (pour protéger les intérêts pétroliers), invoquer la liberté (pour protéger les fabricants d’armes,  l’industries alimentaire, les riches qui ne paient pas d’impôts) l’égalité (pour supprimer  les dépenses publiques destinées à aider les pauvres),  Dieu-encore-lui (limiter l’avortement).
On ne dit jamais de quelqu’un qu’il est gros, noir, obèse, gay ou autre qualificatif, car ce n'est pas politiquement correcte, selon l'expression consacrée, on ne mentionne pas ton âge, ta nationalité, parce que c’est mal élevé et qu’on est tous égaux mais les faits disent le contraire.
 Sur le site d'un comité de quartier : 
 Sorry to bother you all, but I was just unloading groceries from my car (in the 100 block of 7th Street by the alley opening) and I noticed an African American male cross over from the Verizon building and walk into the alley. I’ve never seen him before and since it is a dead-end alley, I was a little suspicious. I went up to our deck to see what he was up to and he seemed to have disappeared. I didn’t see him in any of the backyards and wasn’t brave enough to walk down the alley myself and start poking into the garages. I continued to unload my car and saw him emerge moments later riding a nice, silver bicycle. I reported it to the police, so if you live in the 100 blk of 7th or 8th or the 700 block of A Street and back-up to this alley, check to see if you are missing a bike. If so, hopefully the police will track it down in the next hour and you can claim it. I’m sure this list isn’t comprehensive, so if you can share with any neighbors that live on this square that aren’t on this list, that would be great. Thanks!